12.2023
- Joli titre potentiel : Théorie des rides d'un oreiller (dans les Pensées de Georg Christoph Lichtenberg).
- Idée d'exercice (lu dans les Pensées de Lichtenberg) : décrire deux ou trois fois une vie : une fois comme l'écrirait un ami enthousiaste, une autre comme la décrirait un ennemi et une autre encore comme l'écrirait la vérité elle-même.
- Les nouvelles d'Olga Tokarczuk dans "Jeu sur tambours et tambourins". Dans "Ouvre les yeux" : qu'est-ce qu'un bon livre ? Un espace décrit avec précision et réalisme, des objets dépeints avec l'amour du détail, une description percutante des personnages. Dans "Le double fictionnel de l'auteur" : La littérature est un défi. Elle est la seule de l'existence humaine et, par ailleurs, à doter celle-ci d'une dimension transcendante. La vie en soi, c'est trop peu.
- Note retrouvée (2022) : constituer un journal d'effacement, ce que l'on veut oublier, j'écris dans l'espoir de réussir à me débarrasser de toi, que je trouverais enfin les bons mots pour te vomir, tremblant et gluant et collant, comme ce que les oiseaux recrachent, des bouts d'os, et que tu t'éloignes jusqu'à devenir un petit point au loin puis plus loin pour qu'enfin je sois vide de toi. Mais si je t'écris, ça continue à te faire vivre, mais si je ne t'écris plus, ce que je fais mourir c'est aussi l'idée que tu puisses me faire exister.
11.2023
- Méthode de travail de Pina Bausch : mouvement allant de l'intérieur à l'extérieur. "Mais aussi grande que soit mon angoisse et quel que soit le temps que demande l'achèvement de mes œuvres, la méthode de travail consistant à aller « de l'intérieur vers l'extérieur », à recueillir un certain matériel, puis à le monter, est pratiquement toujours couronnée de succès." Mouvement de soi aux autres ?
- Quelques notes prises dans Tonio Kröger de Thomas Mann (1875-1955, auteur de Tristan, Mort à Venise ou La montagne magique) sur la création : Si vous tenez trop à ce que vous avez à dire, si votre coeur bat trop vite pour votre sujet, vous pouvez être sûr d'un fiasco complet [...] Il est nécessaire d'être dans une certaine mesure en dehors de l'humanité, d'être un peu inhumain, de vivre à l'égard de ce qui est humain, dans des rapports lointains et désintéressés, pour être en état, pour être seulement tenté de le représenter [...] ... je suis quelquefois las à mourir de toujours représenter ce qui est humain sans y prendre part moi-même... La littérature n'est pas une vocation mais une malédiction.
- Ecrire c'est aussi être disponible.
- Mots beaux : peau neuve
racler les bords
tous les jours
se décorer
sauf le dimanche matin
laisser passer les trains
résister à la peau neuve
se vouloir du bien
se promener sans se regarder
sans se retourner
sur soi
chercher ailleurs
- Les débuts, cet instant qui pourrait être heureux ou malheureux, qui décidera de la suite et puis les transitions, quand quelque chose se termine et puis l'indétermination des nouveaux choix.
- Christian Junod pour Sens créatif : plus je suis visible, plus je peux être jugé, critiqué... C'est plus confortable d'être caché... il y a un bénéfice caché à ne pas réussir... Tant que tu t'inquiètes de ce que les autres pensent, tu es en leur pouvoir.
- Guillaume Lamarre "L'étincelle du créatif" : Evertuez-vous à effectuer chaque jour une chose pour votre art ainsi qu'une autre pour vos affaires.
10.2023
Tâche de l'artiste : approfondir des sensations.
Pour tout atelier : proposer un thème et une forme.
Pourquoi ne pas commencer par écrire le dernier chapitre pour savoir vers où on veut aller, où l'on veut arriver ?
Faire un plan simple et au fur et à mesure de l'écriture, l'affiner.
Ella Maillart, exploratrice, écrivaine, voyageuse, photographe, écrit dans "La voie cruelle" qui retrace son voyage vers l'Afghanistan au volant d'une Ford en compagnie d'Annemarie Schwarzenbach : Si vous êtes un écrivain né, le moment viendra où vous serez si fortement inspirée que vous serez comme emportée par votre travail.
Jolis titres : Le bord coupant du jour de Charles Guilbert. D'où me vient la tendresse ? tiré de Le ciel brûle de Marina Tsvetaïeva. Le bruit des arbres la nuit dans Crime et chatiment de Dostoïevski
Notes sur les nouvelles brèves par l'autrice italienne Natalia Ginzburg (dans le recueil "La mère") : Je cessais cependant bientôt de flairer chaque mot, car, à force de m'arrêter sur chacun d'eux, je finissais par ne plus rien écrire ; J'écrivais, par hasard, en effet, épiant la vie d'autres mais sans bien la comprendre et sans rien en savoir, essayant de deviner et feignant de savoir ; Autrefois je me sentais coupable si je n'écrivais pas, me contraignant à écrire même si j'avais envie de ne rien faire et si je me sentais aride et vide. C'en est fini aujourd'hui, fini de me sentir coupable si je n'écris pas, jamais je n'essaie d'écrire si je n'en ai pas envie, je ne considère plus les choses et les gens en songeant que je pourrais les mettre dans une nouvelle, je n'échafaude jamais de phrases ou de nouvelles.
CA Conrad dans "En attendant de mourir à son tour" propose un exercice : Prenez des notes aussi vite que possible, plus vite que ce que vous êtes en train de penser. Ensuite taper les notes dans un seul document. Imprimez-le et prenez-le avec vous pour extraire des lignes et des mots qui façonnent votre poème. Un autre exercice : Vous pouvez sauver une oeuvre d'art avant que les pillages commencent, laquelle sauvez-vous ?
Faire semblant d'avoir de la force jusqu'à l'avoir.
Une chose ratée si tu la changes de place peut être une chose réussie.
Constance Debré dans Bookmakers (se mettre à la place de l'autre) : Le jour où on ne parlera plus que de sa soi disant position, on n'aura plus que des histoires parallèles et chacun sera conforté, prétendument par respect, dans un égoïsme, un narcissisme, une incuriosité, une indifférence qui me dégoûte.
Tentative de jalousie dans Le ciel brûle, Marina Tsvetaïeva écrit :
[...]
Comment ça va "vivre", comment va-t-elle
La force d'être ? Et de chanter, la force ? ...
Comment ça va la vie près d'un produit
De pacotille ? Un peu abrupt, le prix ? ...
Comment ça va, l'ami ? Plus douloureux, moins douloureux que pour moi près d'un autre ?
Choisir un thème, la colère, la tristesse, le corps... et commencer chaque phrase par "Comment ça va de/le/la..."
La poétesse argentine Alejandra Pizarnik parle de ce retour incessant sur les textes du passé auquel elle se sent contrainte par un devoir de faire "l'oeuvre" : Le temps passe. Ou, plus exactement, nous passons. Dans le lointain, toujours plus proche, l'idée d'un travail sinistre que je dois accomplir : la correction de mes anciens poèmes. Fixer l'attention sur eux équivaut à revenir sur de mauvais pas, alors que je suis déjà en chemin vers ailleurs, non pas mieux mais différent.
Ecrire du réel ? Pas obligée de respecter la réalité, ses contours, la réalité a-t-elle des contours ? Jusqu'à quel point je peux porter atteinte au réel ? Quand le texte le demande ?
Faire de l'art veut dire être passionné, toute personne passionnée fait de l'art.
Quelques idées de Nathalie Sejean (Newsletter 29/10/23) : A quoi sert de créer ? La créativité est inutile ? Tout est important. Créer, donc offrir ce que l'on peut offrir au monde de sa singularité que ce soit au travers de la production artistique ou une façon à soi de penser son travail, sa relation à ses amis, sa relation à sa planète, affecte tout le monde, explorer sa créativité n'est pas une activité frivole. Puisque nous pouvons dormir sur nos deux oreilles et imaginer demain, n'est-ce pas notre devoir et oui aussi notre grand privilège que de pouvoir consacrer du temps à nous explorer pour ensuite mettre en commun nos trouvailles ? Je crois que si.
09.2023
Idée piochée dans "Totalement inconnu" de Gaëlle Obiégly : Dans un grand atlas, j'ai indiqué avec des gommettes rondes les lieux où j'ai connu le bonheur, ce sont des endroits de rencontre, de réciprocité, de coïncidence.
Une autre idée de Gaëlle Obiégly dans le même ouvrage, se souvenir d'une année scolaire.

Ecrire sur ce que l'on pressent enfant de la vie adulte, de la violence, de l'alcool, de la sexualité...
Ecrire sur la mémoire de sa main, une main sur un genou, une main dans une main, une main nerveuse qui arrache, qui blesse...
Pourquoi avoir besoin que ce soit difficile, complexe ? Par peur de l'ennui ?
Virginie Despentes: écrire c'est s'autoriser à prendre la parole à visage découvert.
Dès que l'on a honte, c'est dans cette direction qu'il faut aller.
Un passage de "Les grands cerfs" de Claudie Hunzinger :

Morceau de dialogue entre Edna O'Brien et Philip Roth concernant l'écriture : C'est la rançon du métier, en effet. Le passé vous talonne, avec ses douleurs, ses sensations, ses rejets, dans sa totalité...
Une jolie phrase: Sur mes vrais chagrins, je ne pleure jamais ("Lui et moi" Natalia ginzburg)
Que faire des petites notes prises au quotidien, les garder pour les insérer dans le texte parfait ou chercher à les "caser" quelque part le plus vite possible ? Une idée à ce sujet par Natalia Ginzburg dans "Mon métier" compris dans le recueil "Les petites vertus" : Si l'on pense "ce détail est intéressant et je ne veux pas le gâcher dans l'histoire que je suis en train d'écrire... et je le garde en réserve pour une autre histoire que j'écrirai" alors ce détail se cristallise à l'intérieur de soi-même et l'on ne peut plus s'en servir... Les détails se consument et s'usent, à les porter avec soi pendant longtemps sans s'en servir."
Dans ce même texte Natalia Ginzburg parle du "danger de tricher avec des mots qui n'existent pas en nous, que nous avons pêchés au hasard, hors de nous, et que nous rassemblons avec adresse..."
Décrire un endroit dans lequel l'on est jamais rentré en s'inspirant du texte "La maison Volpé" de Natalia Ginzburg:

Ecrire un fantasme, inspiré par un passage des Rapports humains de (toujours elle!) Natalia Ginzburg : nous imaginons que quelqu'un est devenu amoureux de nous, qu'il nous voit lorsque nous prenons une glace avec notre mère, qu'il nous suit en cachette jusqu'à notre maison, et qu'il nous écrit une lettre d'amour
Joli titre d'une oeuvre de 1979 de Mimi Parent, artiste peintre surréaliste d'origine québécoise : Le pli des draps. Le puits des bras. Le bruit des pas.
Ecrire c'est une manière de participer au monde.
Les formidables instructions (dans "Cronopes et Fameux") de Julio Cortázar...


...et ses merveilleuses occupations:


08.2023
Marie-Jeanne Durry : J'écris parce que c'est la forme de travail pour laquelle je suis faite, la façon pour moi "d'escamoter la vie". Une façon aussi de repousser la torture des problèmes insolubles, soit en faisant travailler mon esprit en marge d'eux, soit en les exorcisant par leur fixation un instant dans l'oeuvre.
Marina Tsvetaïeva: Ma tâche, c'est d'arracher tous les masques, même si la peau et la chair viennent avec.
Idées inspirées par celles d'Edouard Levé dans "Oeuvres"(oeuvres dont l'auteur a eu l'idée mais qu'il n'a jamais réalisées) : représenter un film par des bandes des couleurs correspondant aux émotions procurées par chaque scène et qui prendrait la forme d'un diagramme en bâtons. Prendre dix personnes qui ont visité la même ville et afficher sur un mur l'ensemble des photos prises, les rassembler par catégories : églises, restaurants, animaux... en trouver les redondances, peut-être même des passants au hasard pourraient se retrouver dans des photos prises par différentes personnes. Autre idée : écrire un roman qui pourrait se lire dans un sens et dans l'autre.
Très belle phrase de Vladimir Jankélévitch dans son livre "Le nocturne" : C'est grâce à des héros comme Cuzin que la sombre nuit de notre détresse a pu devenir le nocturne de notre espoir et la certitude d'une aurore.
La sombre nuit
de notre détresse
a pu devenir
le nocturne
de notre espoir et
la certitude d'une aurore
Ecrire c'est accepter de participer peu au monde. Comment équilibrer le temps entre les deux, vivre et écrire ? Qu'est-ce qui fait que certaines personnes ne peuvent se contenter de vivre leur vie mais ont besoin qu'elle soit un matériau pour autre chose ?
Introspection (définition Larousse): Observation méthodique, par le sujet lui-même, de ses états de conscience et de sa vie intérieure. Kafka : l'introspection est devenue une ennemie de l'écriture, car c'est un fleuve qui coule à l'envers, qui reflue vers ses sources...Et si l'on était cause de sa propre asphyxie? Si, sous la pression de l'introspection, l'ouverture par laquelle on se déverse dans le monde devenait trop étroite ou se fermait tout à fait ?
Etre écrivain c'est assumer des opinions sociales, politiques...? et la lecture de "Totalement inconnu" de Gaëlle Obiégly : en France, se positionner est une pratique courante... Avoir une position, c'est statique. On adopte une position, on ne bouge plus... [...] Le savoir m'intimide, la connaissance m'émerveille.
Savoir : connaissance approfondie d'une chose
Connaître : avoir la connaissance de l'existence d'une chose
Les mots de CA Conrad dans "En attendant de mourir à son tour" : Laisse du calme dans la coquille de mon oreille; Quand une chose est allumée elle cherche à occuper l'espace; les souvenirs sont stockés dans la chair; Des lieux où on se manque;
Se réincarner
N'importe où
sauf ici
atterir sur un autre bord.
Belle image : La largeur d'une sorcière; Hexentexte d'Unica Zürn, recueil d'anagrammes et dessins, Die Hexe : la sorcière, en allemand le sorcier Der Zauberer est compris dans le sens magique, la sorcière elle, die Hexe, a une signification plus négative.
Un instant refaire son lacet au milieu de la rue, regarder autour de soi, on ne s'arrête jamais là, il n'y a ni feu, ni voiture, il ne devrait y avoir aucune raison de s'arrêter en plein milieu de la rue...
Découverte de Gaëlle Obiégly avec "Totalement inconnu" et regarder, écouter tout ce qui la concerne. Rencontre à la Maison de la poésie : Créer des chemins entre des choses qui n'ont aucun rapport... par exemple créer un lien entre les concepts et les affects... la menuiserie et la génétique, entre des choses dérisoires et des choses qui passent pour des sujets importants, universels.
Exercices : En me penchant au balcon, je peux voir... Une autre idée tirée du thème d'une performance radiophonique et textuelle ("Tu dors?") du master de création littéraire de Paris 8, sous la direction de Norah Benarrosh Orsoni : Te souviens-tu de la dernière fois que tu as perdu ton calme ?
Etudier, lire... détourne des problèmes. Gaëlle Obiégly (dans "Totalement inconnu") : lecture et sommeil qui mettent à l'abri de la vie sociale
Que deviendront les notes d'hier ? Je n'ai jamais pensé à détruire mes notes. Un écrivain doit-il se soucier de sa respectabilité? Entendu quelque part : Le monde a besoin de votre créativité. La lecture d'"Explications" de Pierre Guyotat : La pratique de l'art, c'est se réassurer, et se réassurer tous les jours, à partir de rien, qu'on peut en faire, qu'on est capable d'en faire, qu'on est digne d'en faire encore...car c'est un droit qu'on prend, le droit de créer.
Une phrase : Empêcher le silence de parler trop fort
07.2023
Jolie situation, joli titre : Prendre la mesure des lieux
Andrea Vogler-Corelli citée par Ingmar Bergman dans Laterna magica : Tu dois savoir ce que tu veux, même si c'est une erreur [...] Dans les problèmes artistiques, rien n'est pire qu'une mauvaise conscience, quand tu éprouves l'envie d'abandonner, il faut que tu branches en toi une pile spéciale qui redoublera ton effort.
La joie, l'exaltation d'être en présence permanente d'art, de sentir les idées qui affluent à son contact et en même temps une sensation de grand effroi, effroi est le mot qui vient, quant à l'inutilité de cette exaltation.
Les mots de Rebecca Solnit : J'essayais de ne pas être le sujet poétique d'un autre et de ne pas me faire tuer: j'essayais de trouver ma propre poétique alors que je n'avais ni cartes, ni guides, ni rien ou presque pour aller de l'avant.
Image : les sons laissent-ils des traces ?
La conférence TED Talk de Michael Hansmeyer (2012) architecte et programmeur écrivant des algorithmes pour composer des formes aux milliers de facettes, résultat de milliers de pliages et l'idée que l'on peut choisir l'endroit où l'on veut plier, que si l'on décide de changer l'endroit où l'on marque le pli, alors la transformation peut être complètement différente... Idée que l'on peut appliquer en littérature, si l'on change l'endroit où l'on fait plier le personnage, de quelle manière va-t-il se transformer ? Où va-t-il aller ?
Jean Teulé : Je suis très perturbé par le réel. Je ne comprends pas grand chose aux codes de la vie (...) Tout me perturbe, les trucs officiels à faire, me rappeler des codes, des machins... Dans mon roman, c'est moi qui ai les clés. Quand je me retrouve dans la vie, je suis complètement égaré, perdu. Je ne me sens bien que lorsque j'écris.
Libre et disciplinée
Le style commence après le "il y a"
Pierre Michon, La grande librairie : Je ne dois pas savoir ce que je fais pour le faire bien.

Julia Kerninon "Le chaos ne produit pas de chefs-d'oeuvre":

06.2023
La lecture du théâtre du dramaturge norvégien Jon Fosse. Un extrait de "Et jamais nous ne serons séparés":
Maintenant il faudrait bientôt qu'il vienne
Je ne peux plus rester
en moi-même
Je dois être
à un endroit différent
pas en moi-même
mais à un endroit différent
A un endroit où sont les autres
Dans "Un jour en été" une femme attend son mari disparu en barque sur un fjord.
[...]
et je pouvais entendre les vagues
entendre frapper les vagues
les vagues frappaient et frappaient
et je sentais comme les vagues
frappaient à travers la pluie et l'obscurité
qui étaient moi maintenant
qui allaient être moi
qui seraient moi pour toujours
Idée : Parler d'un départ, un couple dans une maison, un homme, une femme part se balader, en forêt, en ville, ailleurs, il/elle ne reviendra jamais, il/elle attend. S'est-il tué ? S'est-il enfui ?
Comment les souvenirs s'entremêlent, une rue en pente au Laos devient la continuité d'une rue en pente à Romainville. Comment les souvenirs se mélangent pour ne former plus qu'un grand souvenir ?
Est-ce que je peux voir dan l'art autre chose qu'un matériau pour écrire ? La réponse se trouve peut-être dans "L'épuisement" de Christian Bobin : lire pour se cultiver, c'est l'horreur. Lire pour rassembler son âme dans la perspective d'un nouvel élan, c'est la merveille.
"Eloge de l'ombre" de Junichiro Tanizaki, le but de la littérature est de plonger dans l'ombre ce qui est trop visible, rajouter de l'ombre à l'évidence.
"Comment améliorer les oeuvres ratées" Pierre Bayard : Nous ferons dès lors l'hypothèse que l'oeuvre littéraire "réussie", et à fortiori le chef d'oeuvre trouve un équilibre entre deux grands types d'écriture, une écriture de l'hallucination et une écriture de l'isolation. Par écriture de l'hallucination, nous entendons une écriture submergée par un trop-plein d'affects et de représentation, comme possédée par eux. Le sujet y laisse transparaître, avec peu d'aménagements, l'intensité de sa souffrance ou le contenu de ses désirs. Au contraire, une écriture de l'isolation sera marquée par la maîtrise, le contrôle, l'explication.
Le bonheur de lire Christian Bobin, sa liberté, quelques extraits de "L'épuisement" : écrire c'est ne rien oublier de ce que le monde oublie [...] Le travail c'est du temps transmué en argent. L'écriture c'est le même temps changé en or. Son travail (celui de l'artiste) c'est de ne pas travailler et de veiller sur la part enfantine de notre vie qui ne peut jamais rentrer dans rien d'utilitaire. [...] Il y a toujours deux livres dans un vrai livre. Le premier seulement est écrit. C'est le second livre qui est lu, c'est dans le livre du dessous que le lecteur reconnaît ce qui, de l'auteur et de lui, témoigne de l'appartenance à une même communauté silencieuse. [...] j'écris des livres, je dors, j'attends, je perds mon encre avec mon temps.
05.2023
La lecture d’ « Etat des lieux » de Deborah Levy, une idée d’exercice : partir d’un thème, d’un mot, ci-dessous le sable, pour se laisser divaguer, passer d’une pensée à une autre :

Dans le deuxième extrait, Deborah Levy commence par parler d’un souvenir lié à ses chevilles, pour ensuite parler de sa première paire de creepers, pour s’imaginer ensuite fouler les pavés de Paris qui l’amènent au slogan Sous les pavés la plage pour enfin parler de la plage:

Comment créer sans se sacrifier ?
Quelques notes prises en écoutant l'interview de Samuel Benchetrit dans les bonus du DVD de "Chien": pour parler de la tendresse, on est pas obligés de raconter des histoires de gens qui s'aiment, s'entraident... Le cinéma n'est pas là toujours pour te mettre dans le confort.
Contradictions : écrire pour soi, se désintéresser de ce que cela deviendra une fois partagé et en même temps parfois surgit le besoin de reconnaissance.
04.2023
« Je pense quelquefois que si j’écris encore, c’est, ou ce devrait être avant tout pour rassembler les fragments, plus ou moins lumineux et probants d’une joie dont on serait tenté de croire qu’elle a explosé un jour, il y a longtemps, comme une étoile intérieure, et répandu sa poussière en nous… » Cahier de verdure, Philippe Jaccottet
Plus j'écris, plus c'est comme si je me rendais compte de la difficulté d'entretenir cela et plus je le rends grave, comme si avant, j'étais dans l'âge de l'enfance de l'écriture, naïve et rêveuse, et que maintenant c'est quelque chose de grave encore plus difficilement conciliable avec le reste.
Une idée d'écriture pour sortir de chez soi: flâner dans les rues, au hasard, écoutez, regarder, notez ce que vous avez reçu, écrivez un poème, une nouvelle, un paragraphe...
Un joli titre: Le bruit sourd d'un mouvement continu. Lu dans "Variations sur la ville" de Colette Pétonnet.
La tête chargée des problèmes de la vie.
Magnifique lecture de "Lettre à D" d'André Gorz : être avec quelqu'un qui te permette d'être hors du réel pour pouvoir écrire.
Idée de titre: Tesselle (pièce de mosaïque)
Etre un artiste c'est réussir à avoir la même passion quand ça se passe bien et quand ça se passe mal.
Lire le dictionnaire, trouver un mot, un simple mot, pour se lancer, pour la beauté du mot.
03.2023
Un stage de danse soufie et les mots de la danseuse franco-iranienne Rana Gorgani qui peuvent être utilisés dans de nombreux contextes : lorsqu'on tourne si on ne se sent pas bien on peut tomber mais il faut préparer sa chute. Si on prépare sa chute, on ne se blesse pas.
La découverte de l’art brut (qui jusque-là ne provoquait pas grand-chose en moi) : pulsion créatrice nue, sans discours, création non détachée, c’est-à-dire qui ne se dissocie pas de l’histoire de son auteur et des singularités matérielles et techniques de sa production et qui se distingue des autres arts par la présence des femmes (peut-être aussi que l’exclusion est un champ dont pour une fois on n’exclue pas les femmes, extraits de la préface de Michel Thévoz dans le roman graphique « Enferme-moi si tu peux » d’Anne-Caroline Pandolfo, illustré par Terkel Risbjerg) Ce qui compte dans l’art brut, c’est le processus de création, c’est dans la création que l’artiste trouve une jubilation, sans jugement. Quelques « endroits » bruts à découvrir : le musée La Collection de l’art brut de Lausanne, le livre « Aloïse et le théâtre de l’univers » de Jacqueline Porret-Forel, « Enferme-moi si tu peux » cité plus haut, Judith Scott qui reliait des objets avec de la ficelle, facteur cheval et son « Palais idéal », Julius Bockelt qui dessine des nuages, des vibrations, les couleurs d’Aloïse Corbaz, Unica Zürn et ses créatures.

Peinture monumentale d'Augustin Lesage
02.2023
La lecture du "Journal de la création" de Nancy Huston. Il y a dans les esprits cette distinction homme-esprit / femme-corps. Faut-il se détacher du corps ? Le corps éloigne-t-il de la création artistique, de l’art, de l’esprit ?
Alice Diop dans Le goût de M (25/11/22) : ce qui m’intéresse le plus dans les œuvres d’art, ce sont les œuvres qui ne prennent le pouvoir sur rien, sur aucun discours, sur aucune pensée et qui nous laissent une place pour douter, pour vaciller, pour changer d’avis, qui se cherchent, qui prennent le risque de se perdre, d’échouer… ne pas travailler qu’avec des gens qui pensent comme nous, accepter de se laisser vaciller.
01.2023
Au hasard des lectures, quelques phrases qui ressemblent à des titres : Nous ne sommes pas faits à jamais pour pleurer (Countée Cullen "Depuis la tour obscure") ; Sur la branche d’un cèdre l’oiseau sombre (Silvina Ocampo "Sentinelles de la nuit")
La lecture de Silvina Ocampo, comme un ressenti actuel sur le fait de faire lire ses pensées : Remplir un cahier (un blog ?) avec des pensées – des pensées ? -, c’est comme remplir un verre d’eau pour qu’un autre le boive, mais cet autre aimera-t-il l’eau ? Et puis m’en a-t-il réclamé ?... Je m’étais proposé d’écrire quelque chose tous les jours mais aujourd’hui, je suis soucieuse et je me sens comme une maison à plusieurs étages : il n’y a de la lumière et du mouvement qu’au premier, aux autres étages, ce n’est qu’obscurité et silence. Malheureusement, là où la lumière est allumée et où il y a du mouvement, c’est l’étage du souci ; aux autres étages, où j’en appelle à l’écriture, où devraient se trouver les muses, c’est n’est qu’obscurité et silence, de sorte que je ne sais pas ce qu’il s’y passe. "Sentinelles de la nuit"
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